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Éditions du Canoë

Tout vaut la peine si l'âme n'est pas petite
Fernando Pessoa

editions du canoe julian semenov la taupe rougeMichel Thévoz

Les Écrits bruts
Le langage de la rupture

Préface de Jean Dubuffet

Voici réédité l’ouvrage de référence sur l’Art Brut dans l’écrire, revu et complété, portant sur les documents rassemblés par Jean Dubuffet et Michel Thévoz à la Collection de l’Art Brut à Lausanne. Notre société logocentriste fait du langage un pouvoir, et mesure la compétence d’un individu à son aisance à cet égard. Corollairement, le psychiatre fonde ses diagnostics sur les perturbations de l’expression verbale. Or, derrière les murs de l’asile, ou dans la solitude de leur retraite, certains proscrits de notre société s’expriment par l’écrit, secrètement et assidûment. Exclus de l’échange social, tenus pour irresponsables, ils tiennent le langage de ceux qui n’ont plus rien à perdre, et qui n’ont plus à respecter les règles de communication : langage de la rupture et de l’intensité, qui transgresse insolemment la frontière entre l’écrire et le dessiner, et qui nous révèle l’envers de notre culture.

 

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24,00 € each


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Les Ecrits bruts & Le Langage de la rupture,
par Gérard-Georges Lemaire
Michel Thévoz, préface de Jean Dubuffet,
Editions du Canoë, 304 p., 24 euro.

C'est une excellente idée de la part de Colette Lambrichs d'avoir réuni ces deux ouvrages car, en fin de compte, ils n'en font qu'un. Si l'on fait exception des textes de Jean Dubuffet, qui a inventé l'idée de l'Art Brut, ils ont été les premiers à théoriser et même tout simplement à définir ce que pouvait recouvrir ce terme. Quand ils avaient été publiés aux PUF respectivement en 1978 et en 1979, cela se passait deux ans après la création de la collection de l'Art Brut à Lausanne dont Michel Thévoz a été le directeur (il l'a été jusqu'en 2001). J'ouvre une petite parenthèse pour dire que j'avais acheté ces deux livres à l'époque et que je m'étais initié ainsi à des formes de création que je connaissais plutôt mal. En les relisant, j'y trouve le même intérêt : les réflexions de l'auteur n'ont pas pris une ride, même si l'on a beaucoup (et parfois trop) écrit sur ce sujet qui demeure fascinant. Il s'agit tout d'abord d'une remarquable réflexion sur le langage -, ou plus précisément sur les aspects déviants du langage. Il y a une grande clarté dans son propos, ce qui n'était pas si courant à l'époque ou philosophie et sciences humaines privilégiaient le jargon opaque. Thévoz ne s'était pas laissé prendre au piège de cette mode qui a été particulièrement nuisible à la pensée en France, en dépit de son incroyable succès à l'étranger et en particulier aux Etats-Unis.
Il nous a fourni les instruments pour pénétrer un univers où la logique commune est abolie, mais plus encore, où les codes établis dans les arts (même les plus modernes), n'ont pas vraiment cours. C'est une leçon patiente pour désapprendre à déchiffrer les choses, mais aussi une leçon pour apprendre la valeur désormais incontestable de ces créateurs dont la plupart ont longuement séjourné dans les hôpitaux psychiatriques. Son idée n'est pas d'encenser un « art des fous », mais plutôt de remarquer que la folie a permis à certains de ces malheureux de puiser en leur for intérieur des formes étranges, sans aucun doute, mais ayant une dimension esthétique pouvant toucher celui qui les découvre s'il renonce à de nombreux concept préétablis et à des poncifs qui ont la peau dure.
Il ne s'agit pas non plus de les ranger (sauf rares exceptions) dans une catégorie pleine et entière d'art sur le même plan que les autres artistes, ceux qui figurent dans nos musées ou nos galeries. Il s'agit de s'ouvrir à une autre réalité de l'art, parallèle si l'on veut et qui mérite non seulement d'être observée, mais aussi d'être appréciée à sa juste valeur. A notre époque, les choses se sont bien compliquées, car pas mal de peintres, de sculpteurs, d'auteurs d'installations ont voulu puiser dans ce répertoire qui a pour lieu d'expression les murs de l'asile. C'est même devenu la mode actuelle. C'est une grande supercherie, mais qui plaît, hélas. Pour revenir à ces pages, Michel Thévoz a su puiser des références et des orientations dans les textes des penseurs du XXe siècle (de Sigmund Freud à Jean-François Lyotard) sans jamais nous écraser sous le poids accablant des citations. Il s'est d'ailleurs plus attaché à l'écriture de ces figures extravagantes qu'à leur peintures ou dessins (même si certains d'entre eux sont dorénavant très connus). C'est par ce biais qu'il a tenu à montrer quelles ont été les mécanismes qui les ont fait ainsi divergé de la raison commune pour s'engager dans des voies pour le moins surprenantes. Il parle d'« autarcie mentale », ce qui est une belle manière de définir cette écriture en rupture de ban.
Elle ne fait plus partie que d'une correspondance imaginaire, c''est-à-dire que le destinataire est à nos yeux hypothétique. Cela se déroule au-delà du surréalisme, qui est un art de fins lettrés en mal d'émotions fortes (pour ne pas dire de précieuses ridicules du siècle passé). Ce qui est fascinant, c'est l'univers fantastique et baroque que ces hommes ou que ces femmes ont inventé (comme, par exemple, Jeanne Tripier, qui s'est déclarée morte !). Et que dire d'Aloïs, de Jules Doudin, de Sylvain Lecocq, d'Aimable Jayet ? Tous ont été à l'origine de cosmologies bizarres et incompréhensibles et qui, pourtant, nous fascinent et par conséquent nous interrogent.
L'auteur s'est d'ailleurs attaché à approfondir les pratiques de certains d'entre eux, peut-être plus remarquables dans une quête éperdue où ils ont rompu les amarres avec ce qui nous est plus ou moins familier. Ses analyses sont très précises et exposées avec un soin poussé pour la limpidité. Il ne fait pas non plus le panégyrique de ces pauvres ères qui ont eu un talent que personne ne saurait faire entrer dans une catégorie. Soyons, une fois de plus, reconnaissants à Michel Thévoz d'avoir su reprendre avec tant de talent et de finesse l'héritage de Dubuffet sans jamais le dénaturer. Ce sont là deux livres de référence qu'on ne peut pas manquer de lire. En annexe, on trouve un petit essai de Jean Dubuffet et un texte passionnant (et très bien ficelé) de Frédéric Baal. Je dois dire que la relecture de ces pages m'a passablement ému car j'ai retrouvé toute l'émotion que j'avais ressentie au sortir de mes études universitaires quand j'ai découvert par ce biais la littérature et l'art des déments. J'espère, chers lecteurs, que vous y trouverez le même plaisir et le même enrichissement. Et il est assez curieux que cette réédition ait lieu quand paraît la première monographie de Slavko Kopac, qui a joué un si grand rôle bien méconnu dans cette histoire de l'Art Brut !

Gérard-Georges Lemaire

 

 

 

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Le langage de la rupture par Michel Thévoz  (vendredi 7 janvier 2022)

Ouvrage de référence sur l’Art brut, version revue et augmentée des ouvrages intitulés "Le langage de la rupture" et "Ecrits bruts", parus en première édition aux Presses Universitaires de France, collection "Perspectives critiques" respectivement en 1978 et 1979. Michel Thévoz, né en 1938, professeur honoraire de l’Université de Lausanne, a été conservateur au Musée cantonal des beaux-arts de Lausanne, puis conservateur de la Collection de l’Art Brut depuis sa fondation en 1976 et jusqu’en 2001. Michel Thévoz a consacré une trentaine d’ouvrages à des phénomènes borderline. Il a publié récemment "L’art suisse n’existe pas" aux Cahiers dessinés et "Pathologie du cadre" aux Editions de Minuit. Avec une préface de Jean Dubuffet inventeur du terme Art Brut qui écrivait : "Nous entendons par là des ouvrages exécutés par des personnes indemnes de culture artistique, dans lesquels le mimétisme, contrairement à ce qui se passe chez les intellectuels, ait peu ou pas de part, de sorte que leurs auteurs y tirent tout (sujets, choix des matériaux mis en ouvre, moyens de transposition, rythmes, façons d’écriture, etc.) de leur propre fonds et non pas des poncifs de l’art classique ou de l’art à la mode." En effet, Les écrits bruts se caractérisent par une composante plastique singulière. Exclus de l’échange social les solitaires proscrits produisent un écrit inventif, hors normes, hors codes. Le texte de Michel Thévoz est articulé comme suit : l’exil social, l’imputation morbide, la sorcellerie des mots, le corps et l’esprit du texte, la langue de l’ennemi, les maniaques de la nouvelle étreinte. Avec une bibliographie et des illustrations in texto de Sylvain Lecocq, Emile Josome Hodinos, Reinhold Metz, Laure Pigeon, Jeanne Tripier, Katharina, Aloïse, Adolf Wölfli, etc. Broché avec rabats. Format : 12 x 19 cm. 320 p. 24€. Paule Martigny.

Source www.blog-des-arts.com 

 

 

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